Kisangani : A Ngenengene, femmes et jeunes filles recensent les pratiques complices de la culture des violences sur elles

Francois Okonda
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Pendant trois jours, une cinquantaine des femmes et jeunes filles ont analysé les différentes attitudes le long de la route KANDANGBA dans la commune de la Tshopo. C’était au cours de la formation organisée au village Ngenengene en fin juin dernier par l’Ong de défense des droits humains dénommée Groupe Lotus.

Au terme des séances interactives animées par des jeunes juristes, psychologues et sociologues sur les violences sexuelles et celles basées sur le genre ainsi que les discriminations à l’égard de la femme, les femmes de Ngenengene situé à 17 km de Kisangani et villages voisins ont décortiqué leurs quotidiens qui démontrent que la culture des violences sexuelles et les discriminations à leur égard est omniprésente. C’est encré dans notre façon de réfléchir, de parler et même de se mouvoir. Nous devons faire attention à cela, avertit Fidèle BAKIRI avocat et formatrice du groupe LOTUS.
Les réflexions ont permis à l’assistance majoritairement analphabète à mieux comprendre les nombreuses pratiques néfastes des violences basées sur le genre qui depuis longtemps conduisent à priver les femmes et les jeunes filles de ce village de leur dignité et surtout de leurs droits.
A l’issue de cette formation à l’allure dune confrontation selon la tranche d’âge, les croyances religieuses ou culturelles et l’environnement social de chacune, qui permettaient de normaliser et de justifier la violence sexuelle, ont elles-même déceler les préjugés qui permettent à la culture des violences sexuelles et des différentes inégalités perdurer.

La Femme n’est pas une propriété de l’homme

Les femmes de Ngenengene ont répertorié des termes utilisés pour justifier et banaliser les violences sexuelles commises dans les ménages, les places publiques et même les cérémonies.
Elles ont cité les expressions telles que boro na ngai (NDR la fille, c’est de sa chair à consommer en Lingala) qu’utilisent les garçons. Elles ont reconnu que ces expressions traduisent que la femme et la fille sont sous-évaluées. Une catégorie des participants banalisaient ces gestes et paroles qu’ils mettent sur le compte de l’humour, de l’amour, du désir de l’envie, du charmeur… Ces genres des propos sous-entendent que votre jeune fille est un objet qui appartient à l’homme, soit parce qu’il l’avait violée, ou encore l’enceintée le premier”, se désole Rais LIPASO, une autre formatrice du groupe Lotus.
Ce qui a poussé l’assistance à inventorier les termes qui traitent la jeune fille de toutes sortes de nom. “C’est de l’ignorance, ces mots et phrases que nous utilisons régulièrement façonnent négativement la réalité de notre fille, dénonce R. LIPASO. Elle interpelle l’assistance du fait que si ces situations contre la femme perdurent c’est aussi parce que certains chefs locaux et des personnes ayant un certain pouvoir sur les autres, ont adhéré à des pensées sur la masculinité qui véhiculent les actes de violence et de discrimination. Cela s’observe plus dans les milieux urbano-ruraux. C’est ce qui justifie la campagne que mène le Groupe Lotus avec l’appui l’ambassade de la République Fédérale d’ Allemagne en RDC.
Mettre fin aux stéréotypes racines de violence sexuelle.
Dans la salle, il y a eu également quelques hommes notamment le chef du village Ngenengene qui n’a pas hésité à relayer des clichés selon lesquels “l’Internet est venu détruire nos fondamentaux sur l’éducation de base des jeunes filles. Ces dernières n’imitent que ce qui est dans le téléphone”. Cette intervention qui jette le blâme sur la fille alors que c’est elle la plus souvent victime de viol que l’homme, en voulant laisser croire que c’est la survivante du viol plutôt que l’agresseur qui porte la responsabilité du viol.
Cette tête couronnée de Ngenengene, avance aussi l’habillement sexy des filles, la consommation d’alcool, et leurs fréquentations des lieux dits d’intorelance constituent selon lui des invitations à se faire violer. Ces considérations bien qu’elles sortent de la bouche du chef du village risquent de continuer à façonner effectivement la persistance des violences basées sur le genre”, fait savoir une jeune fille allaitante, presque en colère.
Fidèle BAKIRI en sa qualité d’avocat, face à ces stéréotypes des patriarcales, des pouvoirs de l’homme et le contrôle, il a attiré l’attention du chef du village sur la nécessité d’associer les gardiens de la coutume dans cette campagne sur les racines du mal de violence sexuelle et autres formes de discriminations.

Se soutenir pour agir contre la culture de viol

Une prise des consciences s’est manifestée dans le chef de ces femmes paysannes et même de quelques hommes dans la salle du fait qu’ils connaissent désormais les facteurs qui sous-tendent la culture du viol et surtout les mythes qui l’entouraient avant cette formation.
Les femmes de Ngenengene sont déterminées à se soutenir collectivement pour pouvoir agir contre la culture de viol à travers les points focaux qu’elles se sont choisies afin d’assurer une veille pour rapporter des cas au Groupe Lotus afin d’accompagner les victimes pour bénéficier des sanctions juridiques contre les auteurs d’actes criminels contre la femme et le jeune fille.
Le Groupe Lotus s’investit en faveur des femmes pour leur défense, relayer leurs voix et soutenir les survivantes de viols à travers des avocats mises à leurs disponibilités gratuitement. C’est pour cette raison que les femmes et hommes qui ont suivi cette formation ont pris l’engagement communautaire d’apprendre aux jeunes les notions apprise.

Ernest MUKULI